Médecine générale : stopper les fossoyeurs. La médecine générale est-elle en déclin ?

Jerome Marty

 Jerome MartyQuestion posée par le quotidien du médecin du 2 septembre 2015

Il faut surtout y voir le bilan de la gouvernance professionnelle et la responsabilité des syndicats se revendiquant premier syndicat de médecin qui, depuis 30 ans, ont masqué leur incapacité à défendre la profession en se drapant dans le pragmatisme. Ils ont accepté un C à 23 euros alors que la moyenne européenne est à 45 € et c’est à un mois de l’élection aux URPS qu’ils osent demander 30 euros minimum.

Les responsables politiques ont depuis 30 ans, par leurs actes, fait ployer cette profession sous les contraintes administratives, ont restreint son indépendance, encadré sa liberté, bloqué ses tarifs, augmenté ses charges.

 

Cela ne s’est pas fait en un jour, de négociations conventionnelles en lois construites sans concertation, de compromis en abandons, la médecine générale a été le jouet des incompétences, la victime de l’idéologie, le laboratoire des réformes à venir.

Pénurie organisée à des fins économiques et politiques, tarifs sans aucun rapport avec la pratique pour induire l’acceptation d’autres modes de rémunérations, les responsables ont transformé les conséquences de leurs actes en causes. « Les jeunes ne sont pas intéressés par la médecine libérale » « ils ne veulent pas du paiement à l’acte » « ils veulent s’installer dans des maisons médicales ».

Les politiques ont rendu la médecine générale, base même de la médecine à la Française, non attractive et font de cet état de fait la base d’une politique visant à lui donner le coup de grâce.

Comment en sortir ? Il n’est une seule solution mais il est une nécessité : celle de rompre totalement avec ce qui a construit la catastrophe annoncée de l’effondrement de la médecine générale libérale. Cela passe par la sanction des responsables, le réveil des médecins, l’imposition des nécessités, la rupture avec la gouvernance actuelle.

Cela passe par la construction d’un système basé sur la confiance où les acteurs sont reconnus comme seuls vrais experts du système, où la définition de la valeur de l’acte et de celle du médecin tient compte de tous les paramètres, directs et indirects, emploi, sécurité sanitaire, impact social, impact démographique, économique.

Cela passe par la rupture de l’isolement économique tarifaire au sein de l’Europe.

Cela passe par une vraie politique de l’enseignement de cette spécialité médicale, une vraie place au sein du cursus universitaire, avec un nombre de professeurs en médecine générale en rapport avec le nombre de médecins nécessaires à une médecine de qualité.

Cela passe par une multiplication des maîtres de stages et un accompagnement à l’installation.

Cela passe par la construction d’une profession en capacité de construire son avenir au sein de relations conventionnelles sans dominance de l’Etat ou d’une assurance maladie relais de l’Etat.

Cela passe par des ARS qui se doivent d’être partenaires et non plus bras armé de la planification étatique, cela passe par une révision totale du rôle des URPS et de leur place dans le jeu politique professionnel.

Cela passe par la construction d’une formation indépendante tout au long de l’exercice, construite par et pour les médecins.

Cela passe donc par une remise à plat de la Haute Autorité de Santé devenue au fil des ans le jouet des politiques sanitaires…

Cela passe par la capacité des médecins généralistes à être fiers, à se lever et à se battre pour ce joyau, cette profession à nulle autre pareille.

Cette profession de l’homme pour l’homme, cette profession construite sur le rapport à l’autre, la connaissance, le savoir technique, le doute, la compréhension de l’autre, l’échange, la confraternité. Cette profession garante d’une médecine individualisée où les patients s’ouvrent au-delà du champ sanitaire dans une relation de confiance à nulle autre pareille.

La médecine générale appartient aux médecins, l’heure de sa reconstruction sonne, à eux de rendre possible son avenir.

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