Rapport de l’IGAS sur la radiologie : la fabrique du mensonge – Communiqué de Presse du 20 août 2025

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Quelques semaines après les propos injurieux des services de l’état (ministre de la Santé, CNAM) qualifiant certains médecins spécialistes de rentiers, l’IGAS publie un rapport sur la radiologie qui vient appuyer une économie de 300 millions d’euros, issue de pseudo-négociations sur l’imagerie, avec les syndicats représentatifs.

L’UFMLS a annoncé ne rien signer, et les syndicats signataires ont mis un terme aux négociations avec la caisse, après le report des quelques miettes obtenues pour les spécialistes lors de la précédente convention.

Pourquoi donc ce rapport, puisque le directeur de la CNAM a reçu les pleins pouvoirs de l’Assemblée pour atteindre ces 300 millions ? La réponse est simple : la fabrique du mensonge.

Un déficit abyssal et le choix de la financiarisation

Avec 16 milliards d’euros de déficit pour l’Assurance Maladie, et rien n’empêche ce gouffre de se creuser.Depuis des années, l’État préfère économiser sur les effecteurs de santé, plutôt que de responsabiliser les patients ou de faire appel aux complémentaires.Il s’en prend d’abord à la radiologie et à la biologie, qui représentent les plus grosses enveloppes.

Ce choix a des conséquences évidentes :

– La qualité de l’offre de soins se dégrade (machines low-cost, hyperproductivité…)
– Les structures passent aux mains des financiers — car lorsqu’un système n’est plus financé, les investisseurs prennent le relais.

Même un enfant de 10 ans comprendrait qu’une structure autrefois pérenne, à laquelle on impose une baisse de rentabilité, finira par être vendue. Ce fut le cas de la biologie. Le Docteur Fatome applique désormais la même « ordonnance » à la radiologie… en espérant un effet différent. Heureusement que ces décideurs ne sont pas médecins.

Un retournement de veste impossible à justifier

Revenons à ces mêmes décideurs qui, il y a quelques mois, imposaient une baisse de 250 millions à la radiologie, via un accord hors convention avec le syndicat des radiologues.

Voici le marché proposé :

Les radiologues prennent en charge le produit de contraste pour les scanners et IRM (jusqu’alors, les patients l’achetaient et se faisaient rembourser). En compensation de cet effort — qui dépasse largement les 250 millions économisés — une revalorisation minimale des forfaits techniques, nécessaires à amortir les équipements, est accordée face à la hausse des coûts des composants électroniques, à l’inflation et à la pénurie de manipulateurs.

Quelques mois plus tard, la CNAM et l’État communiquent sur l’hyper rentabilité des structures qu’ils viennent tout juste de revaloriser pour les raisons inverses…

Comment justifier cela ?

C’est là qu’intervient la fabrique du mensonge. Pour la première fois depuis des années, la CNAM décide de discuter imagerie médicale avec tous les syndicats représentatifs sous couvert de pertinence des soins.
Pourquoi ? Parce que l’enveloppe de l’imagerie concerne aussi les autres spécialistes.

Par exemple :

L’enveloppe des actes CCAM d’échographie, majoritairement réalisés par des non-radiologues, représente quasiment l’équivalent de celle de tous les autres actes d’imagerie.

La CNAM ayant déjà lourdement chargé les radiologues avec les produits de contraste, tente donc un accord avec ces autres spécialités. Devant l’échec des négociations, où la pertinence des soins ne représente qu’un écran de fumée face à l’ampleur des économies imposées, la CNAM et l’État — par l’IGAS — publient un torchon, un tissu de mensonges…et recommandent, en premier lieu, de sortir l’imagerie des négociations conventionnelles.

Effectivement, se rappelant de la grande époque où l’on sautait par-dessus la convention quand il s’agissait des radiologues, cela était beaucoup plus simple, donc pourquoi ne pas l’officialiser…

Les trois grands mensonges du rapport IGAS

1.La rentabilité des machines

Je défie les auteurs du rapport de démontrer que les forfaits techniques suffisent à rentabiliser un scanner. Ils ont eux-mêmes admis, il y a quelques mois, qu’il fallait les revaloriser pour compenser la prise en charge des produits de contraste.

La baisse de 11 % de ces forfaits mettra à plat :
– Les structures libérales,
– Les GIE publics/privés,
– Et de nombreuses autres entités libérales déjà engagées financièrement par des emprunts de plusieurs millions pour financer ces équipements lourds.

2. La stigmatisation du secteur 2 (honoraires libres)

Alors que de plus en plus de radiologues s’installent en secteur 2 — et on les comprend —, l’IGAS propose d’exclure les futurs spécialistes de ce secteur, sous prétexte de préserver l’accès aux soins.

Mais :
– En secteur 1, les médecins sont pieds et poings liés par les tarifs de l’Assurance Maladie. Qui, à part des financiers, pourra investir des millions dans des machines, en sachant que l’État peut baisser les  remboursements du jour au lendemain sans pouvoir compenser en dehors d’une impossible augmentation des cadences ? La France a déjà atteint les cadences maximales en imagerie et cela se ferait au détriment de la qualité des soins.

– Les radiologues libéraux sont des médecins et des entrepreneurs qui essaient depuis des années de couvrir le territoire. Le responsable des déserts médicaux est l’État et sa politique de santé, et cela depuis des décennies. Le secteur 2 est la seule soupape qui permettrait aux radiologues de sécuriser leurs investissements face à l’instabilité générée par cette politique de rabot.

Faire porter la responsabilité au secteur 2 d’une possible difficulté d’accès au soin en imagerie est donc un mensonge évident servant juste à masquer la responsabilité de l’état incapable d’assumer financièrement l’expansion de l’imagerie autrement que par des baisses sur les effecteurs de soin et les structures.

3. L’intelligence artificielle (IA)

La radiologie révolutionne la médecine moderne. Le rapport, lui, tente de décrédibiliser la spécialité pour justifier les baisses tarifaires en affirmant que l’IA remplacera tant de tâches qu’il ne sera plus nécessaire de les valoriser.

Cette caricature est l’exemple le plus criant du manque de vision et d’expertise des auteurs. L’IA n’est pas une substitution, mais un outil puissant : Elle élève les compétences des radiologues, Elle nécessite des investissements majeurs, que ce soit dans des start-ups ou via des achats et développements internes.

L’État, lui, reste incapable d’accompagner cette transformation. Justifier une baisse des rémunérations par l’IA est une absurdité qui en dit long sur la crédibilité de ce rapport.

Une stratégie qui mène à l’effondrement

La fabrique du mensonge : voilà l’unique levier que la CNAM semble avoir trouvé pour justifier les coupes budgétaires en imagerie médicale. Que cherche réellement l’État ? La disparition d’un des fleurons de la médecine française ?

On peut comprendre une forme d’inquiétude face à l’essor rapide et incontournable de cette spécialité.

Pourtant, lorsqu’une discipline devient à ce point essentielle à la médecine moderne, ce n’est pas en dévalorisant ses actes qu’on prépare l’avenir — bien au contraire.r

Cette stratégie ne fera illusion qu’un temps. L’UFMLS le martèle depuis longtemps : si l’État poursuit cette trajectoire, l’effondrement du système sera inévitable…

Henri Guerini – Vice-Président de l’UFMLS
Responsable de la cellule XRay de l’UFMLS

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