Eux ou nous !

Jerome Marty

Jerome MartySerions-nous à ce point fragiles..

Pour baisser fanions face à l’adversité ?

Pour que le doute et la panique s’emparent de nous, alors que la loi poursuit son processus législatif ?
Pour penser que nous avons échoué, alors que notre mobilisation était historique, avec plus de 90 % des cabinets médicaux fermés et 2/3 des établissements impliqués ?

Depuis trois jours, je vois et je lis des réactions qui dénotent de la colère, de la peur, de la désespérance de certains présidents de syndicats à des médecins non syndiqués.

Et, lorsque le doute s’installe, il est bon de se rappeler la base de notre combat.

La loi de modernisation de la Santé étatise la médecine de France, bafoue le serment d’Hippocrate en supprimant l’indépendance d’exercice, la liberté de pratique, le secret médical.

La loi ouvre la porte à l’intégration des médecins dans les réseaux de soins par le désengagement de la Sécurité sociale et l’augmentation de la part de remboursement des complémentaires.

La loi met fin à la liberté d’installation en confiant aux ARS la responsabilité de la répartition homogène de l’offre, l’imposition des regroupements au sein de maisons pluridisciplinaires subventionnées.

La loi permet aux ARS d’écrire et d’imposer les projets médicaux.

La loi met en place une surveillance permanente des pratiques et des parcours de soins au travers du Dossier Médical Partagé, elle permet la mise en place de sanctions financières par le prélèvement par l’organisme financeur d’indus ou de trop perçus directement sur les sommes à devoir aux médecins. Elle crée une médecine de quotas : quota de patients, quota d’actes, quota de pratiques.

La loi impose la faillite à nombre d’établissements privés en les excluant du Service Public Hospitalier à moins d’accepter la suppression de tous honoraires complémentaires en leur sein (elle maintient le secteur 2 à l’hôpital public).

La loi favorise pour demain le salariat à bas coût des médecins et l’effondrement de la qualité et donc de l’existence du secteur hospitalier privé, de même, elle oblige la soumission des comptes de ces entreprises privées à l’Etat, et crée la notion sanctionnante de bénéfice excessif.

La loi impose au patient la ponction de la franchise par l’assurance maladie directement sur son compte bancaire, la loi impose aux médecins les vérifications administratives de la protection du patient.

La loi rend le médecin dépendant de la célérité des organismes financeurs à le rémunérer.

La loi met un terme au paritarisme et donne la responsabilité de la définition du périmètre conventionnel au ministère, la loi fait des syndicats des structures au pouvoir délimité par le ministère.

La loi oblige le médecin à obéir aux protocoles et procédures de bonnes pratiques définis par l’HAS et normalise la médecine, la loi détruit la médecine individualisée pour une médecine collectivisée.

La loi permet le prélèvement d’organe sur tout défunt en l’absence d’inscription sur un registre de refus sans l’avis des familles. La loi abroge la clause de conscience, la loi interdit les soins de conservation des corps à domicile…

La loi de modernisation de la santé est une loi sans éthique, sans morale, sans valeur.
Seuls les intérêts économiques, politiques, idéologiques, électoralistes et carriéristes la justifient.

La loi de modernisation de la Santé est dangereuse pour nos patients, mortelle pour nos modes d’exercice, elle va détruire l’équilibre et la qualité de notre système sanitaire et ouvrir le champ des possibles jusqu’aux horreurs les plus absolues par l’accès aux données de santé du marché.

La médecine a toujours progressé plus vite que la société, plus vite que la justice et les risques de dérives étaient minorés, voire évités, grâce à l’éthique et à la déontologie. Aujourd’hui la médecine n’est plus le secteur au développement le plus rapide : dépassée par les NBIC (Nanotechnologie Biotechnologies, Informatique et sciences Cognitives),elle pourrait être demain sous leur dépendance. Or ce secteur de développement n’est nullement encadré par l’éthique et ne connaît aucune déontologie.

La loi de Santé favorise pourtant l’interface entre la médecine et le marché et ouvre les données de santé.
La loi de Santé est une loi sans éthique à l’heure où il n’est pas fou de voir poindre, par l’accès qu’elle donne aux données de santé, un fascisme 2.0.

Chères consoeurs, chers confrères, rappelons-nous pourquoi nous luttons et, face au monstre que représente cette loi, il n’est qu’une question à se poser : Ai-je le courage et l’envie de me battre pour ce que je suis : un médecin, un soignant ?

Le vendredi 13 novembre, nous avons montré que nous pouvions renverser cette loi. Lorsque la folie terroriste a frappé l’avenir, nous ne pouvions faire autrement que de stopper notre action.
L’honneur est à la base de tout combat victorieux, il est l’essence même de la résistance.

Certains ont vu dans cet arrêt une faiblesse, à ceux-là je dis : nous avons exprimé l’âme de la médecine et des soignants par cette décision, et cela fait partie du combat.

J’ai lu aussi des déclarations affirmant que les actions précédentes n’avaient rien donné et que « nous en avions soupé des grèves qui ne servent à rien ou de l’arrêt de la télétransmission ».

Je répondrai brièvement que ce sont ces actions qui ont permis d’aller au 13 11 et de mettre en place cette action gagnante stoppée par le massacre le plus important que la France ait connu depuis la deuxième guerre mondiale.
Que l’arrêt de la télétransmission est la pierre angulaire de la lutte « chronique  » contre la loi : sans télétransmission pas d’alimentation du Dossier Médical Partagé, pas de Tiers Payant Généralisé, pas de base de Données patients, pas de Gestion du risque financier pour les complémentaires et pas de solvabilité pour ces mêmes organismes.

J’ai vu rien moins que des présidents de syndicats affirmer : les médecins ne bougeront plus pour des arrêts d’activités, oubliant là encore QUE NOUS N’AVONS PAS CONNU D’ECHEC ! Et que nous avons le devoir face à nos enfants de ne pas accepter cette loi !
Oubliant surtout que nos sacrifices financiers ne sont rien en termes d’impact à côté de ce que va subir demain l’immense majorité des soignants.
Une journée d’arrêt stoppée par l’abomination, et nous aurions tout donné ?
Je ne peux le croire.

J’ai vu aussi des « croisés » du déconventionnement qui s’étaient mis en avant dans les médias….ne pas le faire du fait d’une impréparation certaine, et affirmer partout péremptoirement que toute autre action est inutile…

La lutte ne pourra être que plurielle, c’est pour cela que nous avons défini 5 types d’actions :

Arrêt de la télétransmission, arrêt de la PDS dès 2016 (date amenée à bouger en fonction du calendrier du vote final de la loi), confection et distribution de kits de déconventionnement afin que chaque médecin, chaque soignant ait accès au consentement éclairé s’agissant de cette action, de ce choix. La ministre a construit sa loi sur la privation de vos libertés, nous allons construire l’abrogation de sa loi sur le recouvrement de vos libertés !
Action politique au sein de nos cabinets par la transparence du vote final de la loi en inscrivant le nom du député et le sens de son vote afin que celui-ci soit visible de tous et ce jusqu’aux prochaines législatives (affiche ci-dessous). Nous n’avons pas de question à nous poser quant à ce geste, au regard des conséquences de la loi, ceux qui la voteront en porteront l’entière responsabilité et devront en subir les conséquences électorales en étant écartés de tout mandat électif.
Cette loi veut abattre la médecine libre, c’est eux ou nous, battons-nous encore et ils perdront.
Enfin si ces actions ne suffisent pas ou échouent dans leur dimensionnement alors nous devrons organiser un nouveau blocage global et total.

La loi est votée dans un mois, et alors ?

 Allons-nous l’accepter, allons-nous attendre 2017, attendre les décrets d’application du TPG, pour dire que nous désobéissons ? Alors que les décrets concernant la puissance hégémonique des ARS seront sortis et que nous serons plus affaiblis que jamais ? Avons-nous peur ? Doutons-nous ? Sommes-nous fragiles ?

Si c’est le cas, alors nous méritons de devenir des effecteurs de soins, si c’est le cas alors nous méritons de disparaître.

Nous n’allons pas disparaître : la liberté, l’indépendance, la responsabilité qui sont les nôtres dans la défense de nos valeurs sont des ressources autrement plus fortes que les calculs politiques d’un gouvernement ou le carriérisme d’une ministre de passage.
Nous n’allons pas disparaître, c’est cette loi ou nous, c’est eux ou nous !

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